Bâillement après bâillement, vos paupières ont tendance à peser de plus en plus lourd, puis votre tête chancelle brusquement. Pour vous réveiller, vous frottez vos yeux épuisés et essayez de vous concentrer sur votre travail. En vain. Pour ne pas vous laisser appeler par les bras irrésistibles de Morphée, vous avez fini par vous lever pour vous servir un thé ou un café bien corsé, demander un renseignement à la collègue du bureau d’à côté… à moins que vous ne vous soyez risquée à aller en catimini jusqu’aux toilettes pour vous laisser sombrer quelques minutes et recharger vos batteries !
Alors qu’au Japon la sieste est obligatoire, qu’elle est même inscrite dans la constitution chinoise depuis 1948, dans les pays européens et en particulier en France, elle reste encore un sujet tabou. Celles et ceux qui osent s’y adonner sont souvent vus d’un mauvais œil et considérés comme des gros paresseux.
Si certaines entreprises comme Google, Orange ou Renault ont franchi le cap de proposer des espaces dédiés à la sieste sur le lieu de travail, en France, dans l’ensemble, par manque de place, de budget et de volonté, rares sont celles qui le proposent à leur salariés.
Pourtant, dans un contexte où QVT et bien-être au travail n’ont jamais été autant prônés, les chefs d’entreprises auraient tout intérêt à le proposer.
Pourquoi ? Voyons sans attendre 5 vertus inattendues qu’offrent les micro-siestes.
#1 – Redonne une pêche d’enfer et renforce l’esprit d’équipe
Toutes celles d’entre vous qui ont testé la micro-sieste peuvent en témoigner : une petite sieste de quelques minutes redonne une pêche d’enfer et un moral d’acier ! C’est une recette à portée de toutes puisqu’un seul quart d’heure de bon repos suffit à réparer les plus grandes fatigues.
Des études menées par des chercheurs américains ont prouvé que la sieste chez l’adulte engendrait une amélioration de l’humeur et du bien-être ressenti. Un repos bref permet en effet d’augmenter la synthèse de la sérotonine, aussi appelée hormone du bonheur, qui permet de voir la vie de façon plus sereine et joyeuse, et par voie de conséquence renforce l’esprit d’équipe !
Quelques conditions sont à respecter à tout prix pour bénéficier de tous les bienfaits de cette pause détente : se trouver un endroit calme, sombre et frais (entre 18 et 20°), pas plus de 30 mn et surtout ne pas piquer un roupillon après 15 heures sous peine d’avoir des problèmes de sommeil la nuit.
Alors que les entreprises cherchent à augmenter la productivité et à faire face à une concurrence accrue, 15 à 30 minutes de repos récupérateur et de déconnexion totale sont une valeur sûre pour regonfler à bloc les équipes !
Mais ce n’est pas tout. Cette pratique ancestrale offre d’autres effets inattendus et pas des moindres en cette période de crise sanitaire mondiale…
#2 – Réduit le stress et booste le système immunitaire
Ce n’est plus un secret pour personne, la privation chronique de sommeil a des effets immédiats sur l’organisme. Pourtant, selon le baromètre de Santé Publique France, en 2019, le temps de sommeil moyen des Français est passé en dessous des 7 heures par nuit (en incluant les week-end). Et selon une enquête menée en 2014 par l’INSV (Institut National du Sommeil et de la Vigilance), plus d’un Français sur trois dort moins de 6 heures.
La dette de sommeil est donc un problème récurrent. Pas étonnant d’avoir un coup de pompe à certains moments de la journée…
Mais outre le fait que l’on manque d’énergie quand on est en écrasant déficit de sommeil, de nombreuses études ont montré que ce problème avait aussi des conséquences sur nos défenses immunitaires.
Parmi elles, une étude américaine de 2015, réalisée auprès de 164 personnes volontaires âgées de 18 à 65 ans. Les individus ont d’abord répondu à un questionnaire médical afin de récolter des informations sur leur caractère et prendre en compte certains facteurs de stress ou encore leurs habitudes alimentaires et de consommation d’alcool et de tabac. Puis pendant une semaine, les chercheurs ont mesuré leurs habitudes de sommeil avant de démarrer l’étude.
Les scientifiques leur ont ensuite administré l’un des virus du rhume par voie nasale et prélevé des échantillons pendant une semaine afin d’étudier la réaction des sujets à l’introduction de cet agent pathogène dans leurs narines.
Les résultats de cette étude sont sans appel ! Indépendamment des autres paramètres (consommation d’alcool ou pas, sujet de nature plus ou moins anxieuse, etc.) les personnes ayant dormi moins de 6 heures par nuit durant la semaine précédant l’administration du virus avaient 4,2 fois plus de risques d’attraper un rhume que celles ayant effectué des nuits de plus de 7 heures. Quant à celles qui ne dorment qu’entre 6 et 7 heures par nuit, le risque est modéré mais non négligeable : l’augmentation étant multiplié par 1,6, soit prêt d’une chance sur 2 de tomber malade.
Parce qu’une dette de sommeil affaiblit le système immunitaire, une nuit de 7 à 9 heures reste le moyen le plus efficace de ne pas s’enrhumer…
Les effets constatés dans cette étude concernent seulement un simple rhume. Mais le manque de sommeil a aussi des effets délétères pour des maladies beaucoup plus impactantes (gastro, grippe, maux de dos, ulcère à l’estomac, cancer…). Cette pratique enfantine pourrait donc aussi être un moyen de prévention efficace pour réduire l’absentéisme.
Une autre étude française inédite, menée en 2015 par une équipe de chercheurs du Centre du sommeil et de la vigilance de l’Hôtel-Dieu à Paris, a analysé la salive et l’urine de patients privés de sommeil la nuit et suivi ou non d’une sieste. L’objectif était de voir la relation entre le sommeil, le système de stress et le système immunitaire.
Après une nuit de sommeil écourtée, les sujets ont vu leur niveau de noradrénaline (neurotransmetteur favorisant l’éveil, l’excitation, la vigilance…) multipliés par 2,5 ; après une sieste de 30 minutes, ils avaient retrouvé un taux normal.
Dans la salive de ces mêmes sujets, on a observé une dépression d’un agent de défense qui lutte contre les infections buccales (l’interleukin-6) ; la quantité de cette hormone du système immunitaire remonte après une sieste de 30 minutes.
Ces deux résultats prouvent de façon scientifique que la sieste réduit physiologiquement l’activité des systèmes de stress et activent les actions du système immunitaire.
Mais encore plus fantastique, la sieste apporte un autre avantage incroyable…
#3 – Améliore la concentration et la mémorisation
Saviez-vous qu’une sieste rapide aide à mieux mémoriser les apprentissages ?
L’expérience était la suivante : des chercheurs allemands ont demandé à deux groupes de personnes de mémoriser un jeu de cartes illustrées, puis, après un intervalle de 40 minutes, d’apprendre un autre jeu de cartes. Pendant la pause, l’un des groupes a fait une sieste tandis que l’autre est resté éveillé.
Les deux groupes ont ensuite été testés sur la première série… Et devinez quoi ? A la plus grande surprise des chercheurs, le groupe qui avait fait une sieste pendant la pause a obtenu un score de 85% de bonnes réponses contre 60% pour ceux qui sont restés éveillés.
Pourquoi ? Pour expliquer le processus, le professeur Matthew Walker, expert anglais en neurobiologie, compare le fonctionnement de l’hippocampe à une boite aux lettres. Cette partie du cerveau se remplit, et pour que le ramassage du courrier puisse avoir lieu, la clé dont dépend l’expédition est dormir. Tant que ce n’est pas le cas, le courrier reste dans la boite de réception et il est impossible d’y accéder.
La sieste semble pousser les souvenirs et les apprentissages vers le néocortex, boite de stockage plus permanent, les empêchant d’être écrasés…
Pensez-y la prochaine fois que votre enfant devra apprendre une poésie ou mémoriser un cours de géographie !
Une dernière étude, australienne cette fois…
A la demande de l’université Flinders, des volontaires s’étaient limités à seulement 5 heures de sommeil par nuit.
L’étude a démontré que les participants qui avaient fait une micro-sieste de 10 à 30 minutes leur avait apporté des améliorations cognitives immédiates et une somnolence ou une fatigue moins subjective, avec des bienfaits ressentis jusqu’à 155 minutes (soit plus de 2 heures et demie) après la sieste.
Ces découvertes vous semblent fabuleuses ? Pourtant, c’est loin d’être terminé. Si vous faites attention à votre ligne ou si vous avez pris quelques kilos pendant le confinement, je vous livre une autre découverte scientifique étonnante…
#4 – Augmente la créativité et facilite la résolution de problème
Un esprit disponible est la base de la créativité. Faire la sieste permet de mettre le cerveau au repos un bref moment et de le recharger.
Les fonctions cognitives et l’efficience sont alors décuplées, les réflexions et le travail sont plus fluides et plus rapides. En effet, il a été constaté que la disponibilité du cerveau après une sieste est la même qu’au moment du réveil. Il est donc désormais avéré que les prises de décision et la résolution des problèmes sont facilitées après une phase de sommeil réparateur.
Aider les astronautes à faire la sieste était l’objectif d’une série d’expériences financées par la NASA et menées en 2005, en coopération avec le National Space Biomedical Research Institute. Lors de ces expériences, 91 volontaires ont passé 10 jours à vivre selon l’un des 18 fuseaux horaires de sommeil. Les durées de sommeil allaient de 4 à 8 heures, combinées à des siestes quotidiennes allant de 0 à 2 heures ½.
Pour mesurer l’efficacité des siestes, les scientifiques ont donnés aux volontaires une batterie de tests explorant la mémoire, la vigilance, le temps de réponse et d’autres compétences cognitives tout au long de l’expérience. La vigilance et la vigilance de base n’en ont pas beaucoup profité mais à leur grand étonnement, les chercheurs ont constaté que les performances de la mémoire de travail en ont grandement bénéficié.
La mémoire de travail implique de concentrer l’attention sur une tâche tout en gardant d’autres tâches en mémoire … c’est une capacité fondamentale critique pour effectuer un travail complexe comme piloter un vaisseau spatial. Or une mauvaise mémoire de travail peut entraîner des erreurs fatales.
C’est ce qu’a compris l’aviation civile quelques années auparavant, grâce à une autre étude menée par la NASA en 1990. Afin que la vigilance des pilotes de vols long-courriers soit d’une efficacité maximale lors des phases critiques du vol (descente et atterrissage), ces siestes d’environ 20 minutes doivent être effectuées au moins une heure avant la descente.
Les principales conclusions de cette étude sont que :
- les pilotes peuvent obtenir rapidement, tout en restant à leur poste, des périodes courtes de sommeil de bonne qualité,
- ces siestes améliorent les performances évaluées par un test de temps de réaction,
- les pilotes du groupe « sieste » ont présenté 5 fois moins d’épisodes de somnolence que le groupe contrôle, indiquant une efficacité de ces siestes sur le maintien de la vigilance au cours du vol.
Des salariés qui se sont reposés en début d’après-midi sont plus performants et bouillonnent de bonnes idées. Un repos estival idéal pour recharger ses batteries et payant pour le retour au travail.
Mais vous n’êtes pas au bout de vos surprises !…
#5 – Manger moins et ne pas prendre de poids
Tous les spécialistes de la santé nous le rabâchent à longueur de journée : pour perdre du poids, bougez plus ! Pourtant, un autre facteur moins connu mais tout aussi bénéfique pour la santé et contribuant inexorablement au maintien de notre poids de forme : le sommeil.
Selon une étude de l’Institut National du Sommeil et de la Vigilance (INSV) publiée en 2015, dormir moins de six heures par nuit augmente les risques d’obésité de 34% chez les femmes et de 50% chez les hommes.
Pourquoi ? Parce que l’insuffisance de sommeil provoque une sécrétion abondante de la ghréline (hormone qui stimule la sensation de faim) dans l’estomac et diminue drastiquement celle de la leptine (hormone de la satiété) sécrétée pendant la nuit.
Alors c’est assez simple : moins vous dormez, moins vous produisez de leptine et plus vous avez faim. Et si vous mourrez de faim… vous mangez plus. CQFD.
Mais que faire pour sortir de ce cercle vicieux ? Et si je vous disais qu’une bonne sieste participait au maintien de notre poids ? Lorsque votre quantité de sommeil nocturne est nettement insuffisant, l’INVS recommande les siestes quotidiennes.
Bien sûr, ne vous reposez pas uniquement sur la sieste pour maigrir ! L’activité physique et une alimentation saine et variée restent évidemment des ingrédients indispensables à votre bien-être pour éliminer vos kilos en trop.
Mais ce moment de savoureuse détente vous donnera un shoot d’énergie pour réussir à résister sereinement aux aliments hypercaloriques qui vous attirent à eux comme des aimants et par la même occasion, réduire les risque de maladie cardio-vasculaire.
En conclusion, si la machine à café est un incontournable, seule une poignée d’entreprises ont instauré une « siesteria » digne de ce nom et seuls 12% des dirigeants d’entreprises sont favorables à la sieste sur le temps de travail.
Pendant des années nous avons perçu la sieste au bureau comme un acte de paresse et comme une perte de temps. Aujourd’hui celle-ci s’impose finalement comme une réelle nécessité afin d’améliorer l’efficacité, la créativité et la productivité des salariés.
Certains médecins du travail sont d’ailleurs favorables à la sieste et la préconisent afin de diminuer le risque d’accidents du travail. Et d’après la Commission nationale américaine sur les troubles du sommeil, un tel repos économiserait une fatigue qui coûte des dizaines de milliards de dollars.
Alors si siester vous tente, vous avez à présent tous les arguments pour prôner les bienfaits de la sieste éclair au travail. Et sachez qu’il vaut mieux piquer un somme de quelques dizaines de minutes que de végéter devant un écran.
Comme disait l’ancien premier ministre Mr. Winston Churchill : « Ne pensez pas que vous travaillerez moins parce que vous dormez pendant la journée. Vous serez en mesure d’accomplir plus ».
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Vous êtes une inconditionnelle de la sieste au travail ? Votre entreprise a dédié des siesterias dans ses locaux et vous en profitez allègrement ? Vous aimeriez profiter de telles installations mais vos collègues le verrait d’un mauvais œil alors vous vous cachez pour vous octroyer quelques minutes de sommeil réparateur ? Ou au contraire vous trouvez que la sieste est une réelle perte de temps ? Partagez vos expérience et donnez-nous vos avis dans les commentaires ci-dessous !